Le bitcoin (BTC) fait parler de lui cette semaine pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, l’actualité est creuse et tout le monde est un peu fatigué de commenter les tweets de Donald Trump ou l’essai du dernier missile nord-coréen.
Ensuite, le bitcoin a franchi pour la première fois la barrière des 10 000, puis des 11 000 USD cette semaine pour retomber à l’heure – à la minute, serions-nous tentés de dire – où nous écrivons à 9 285 USD. Le bitcoin s’est avéré être un des meilleurs placements de ces dernières années. Depuis le début de l’année, la monnaie virtuelle affiche une hausse de 880 % ; depuis le 1er janvier 2013 (date à partir de laquelle Bloomberg a commencé à en recenser le cours), le bitcoin a grimpé de plus de 7 000 %.
L’envolée du Bitcoin a toutes les apparences d’une bulle financière.
Comme le rappelle Jean Tirole, notre prix Nobel d’économie, dans les Echos, le bitcoin n’a aucune valeur intrinsèque et peut voir sa valeur s’effondrer du jour au lendemain… ou pas. Le bitcoin, comme l’or, ne vaut que par la valeur que les gens lui donnent. Ce n’est pas une monnaie, car si le bitcoin peut servir de moyen d’échange, ce n’est pas une unité de compte ni une réserve de valeur.
Le bitcoin est le fruit d’une innovation technologique, la blockchain.
Aujourd’hui, pour faire une transaction, deux contreparties échangent soit des espèces, soit une écriture (virement, chèque, etc). Le paiement en espèces a tendance à disparaitre ; les paiements se font de plus en plus sous forme d’écritures, notamment électroniques (cartes bancaires, paypal…). Pour que ce système d’écritures fonctionne, il faut que les écritures soient centralisées dans un système de paiement. Dans ce schéma, les banques sont indispensables.
Avec le bitcoin, plus besoin de banque : les transactions se font directement entre les contreparties ; la cohérence des paiements est assurée par le réseau des utilisateurs connectés entre eux. Le principal avantage du bitcoin est donc d’abaisser le coût des transactions, puisqu’il n’y a plus besoin de rémunérer les intermédiaires. Le bitcoin est un peu à la banque ce que l’internet fut au minitel : un espace ouvert, démultiplié et non contrôlé. De manière accessoire, le bitcoin satisfait l’idéal libertarien, puisqu’il échappe au contrôle des autorités étatiques (donc judiciaires, ce qui en l’espèce satisfait les intérêts des mafias en tout genre).
Nous ne sommes pas pour autant persuadés que le bitcoin ait un grand avenir.
Une monnaie, c’est de la confiance, une manière de se coordonner sur une abstraction. Un billet de banque après tout n’est qu’un bout de papier, mais il est validé par des institutions, ce qui lui confère une stabilité certaine. On sait que 10 € ou 10 $ auront à peu près le même pouvoir d’achat dans la zone Euro ou aux États-Unis l’année prochaine qu’aujourd’hui, à l’inflation près. Rien de tel avec le bitcoin qui n’est garanti par rien du tout, et qui n’est accepté comme unité de transaction que dans certains endroits. Au fond, le bitcoin ne vaut pas mieux qu’un ticket restaurant électronique, il est certainement beaucoup plus volatil.
En revanche, la technologie du bitcoin est promise à un grand avenir.
Peut-être pas la blockchain elle-même, mais le DLT, le Distributed Ledger Technology (technologie de registre partagé), dont la blockchain est une des variantes. En effet, la blockchain a des inconvénients multiples : comme nous l’avons dit, elle n’est pas reliée à une institution solide, elle demande énormément de mémoire et donc consomme beaucoup d’énergie, et elle n’est pas très adaptée aux transactions financières pour des raisons diverses et variées. Dans un rapport paru au mois de septembre(*), la Banque des Règlements Internationaux évoque d’autres protocoles de DLT, mais où le dénouement des transactions serait confié à des « notaires » électroniques, moins gourmands en mémoire que la blockchain.
Un jour viendra sans doute où les banques centrales auront leur propres monnaies cryptées. La Banque Centrale Canadienne a déjà fait un essai de faisabilité technique pour une monnaie de ce genre, le CADcoin. Rien n’empêche de penser que le FEDcoin ou l’EUROcoin verront le jour prochainement. Sous quelle forme, sous quelle technologie ? Il est encore trop tôt pour le dire.
Le DLT est une rupture technologique.
Et comme chaque fois lors de ce genre d’événements, il y a des tâtonnements, des emballements, des coups de folie, avant que la nouvelle technologie ait gagné en maturité.
L’histoire du bitcoin ressemblera à ce que nous avons connu au moment de la bulle internet : une valorisation qui s’envole, puis qui s’effondre, mais une révolution technologique qui continue de se déployer dans les années qui suivent, avec d’autres acteurs.
(*) Morten Bech & Rodney Garratt ; « Central Bank Cryptocurrencies » BIS Quarterly Review, septembre 2017 https://www.bis.org/publ/qtrpdf/r_qt1709f.pdf
Hugues de Montvallon
Responsable de la Recherche
ODDO BHF Banque Privée
Rédigé le 30 novembre 2017
ODDO BHF Banque Privée
- Hugues de Montvallon, auteur de cet article, appartient à l’équipe d’experts des marchés financiers de ODDO BHF Banque Privée.
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